mercredi 10 septembre 2008

Fauves Hongrois, l'exposition de Céret

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Róbert Berény, Autoportrait (1906)

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Jusqu'au 12 octobre 2008


Cette très belle exposition fait suite à la grande exposition qui eut lieu à la Galerie Nationale Hongroise, en 2006 à Budapest : Les Fauves hongrois de Paris à Nagybánya, 1904-1914. De nombreux articles lui ont été consacrés. Elle permet de découvrir des artistes assez peu connus en France et témoigne de la richesse des échanges entre nos deux pays.

« Autrement fauves. Remarquable est l’énergie qui caractérise les aventures esthétiques hongroises entre 1904 et 1914 : paysages d’hiver aux couleurs éclatantes, simplification de l’espace au ciel réduit sinon absent, aux ombres marquées, aux contours appuyés. Etranges et dérangeants, ces autoportraits d’une mordante ironie, volontairement exagérés avec toujours la volonté de mettre en relief la nature intérieure.

Berény, Czóbel, Ziffer, Csaba, Bornemisza … témoignent par leurs œuvres de l’affirmation de leur propre style, influencé naturellement par leur contexte culturel et local : débauche de lumière, mais aux couleurs sourdes et aux bleus orientaux, grandioses, mais jamais tristes. »
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Chantal Thévenot ( extrait d'un article de L'agora des arts)
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Cette exposition est reconnue d'intérêt national par le Ministère de la culture et de la communication et direction des musées de France.

Le site du Musée d’art moderne de Céret (Pyrénées Orientales).
Tél : 04 68 87 27
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Images tableaux :
Lajos Tihany, Intérieur (1908). Budapest.
Sándor Ziffer, Vue du haut de la tour Istvan (1908). Budapest, Magyar Nemzeti Galéria.
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Fauves Hongrois, le catalogue de l'exposition

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Róbert Berény, Nu féminin couché (1907). Budapest Magyar Nemzeti Galéria.

Présentation :
« Le désir des jeunes artistes hongrois au début du XXe siècle était d'aller chaque hiver étudier à Paris - même s'ils devaient y vivre dans la misère -, puis de peindre en été à Nagybanya, et d'exposer à l'automne à Budapest. Les peintres comme Berény, Czobel, Perlrott Csaba ou Bornemisza fréquentent les académies Julian, Colarossi et, entre 1908 et 1910, l'académie Matisse. Ils découvrent les musées, les galeries Durand-Ruel et Vollard, ainsi que Gauguin, Seurat et Van Gogh.

Surtout, ils sont mêlés à l'aventure des artistes fauves français, exposent au célèbre Salon d'automne de 1905 dans la salle contiguë à celle des fauves et reviennent dans leur pays avec des peintures qui provoquent une véritable " révolution " parmi les autres peintres hongrois. Les tableaux explosent de couleurs vives, éclatantes, " fauves ". Les artistes conquièrent une liberté d'expression qu'ils associent à la tradition naturaliste hongroise. L'art hongrois s'ouvre à une nouvelle créativité. »

samedi 6 septembre 2008

Aimez-moi : Attila József

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L’OEUVRE POÉTIQUE, ÉCRITS INTIMES TRADUITS PAR GEORGES KASSAÏ (ED. PHÉBUS)

Aimez-moi ... Lili aime-moi.
Oui, on songe à cet écho.
D’Attila József à Maïakovski le mot aimer tel un cri pour annoncer la mort choisie ?
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L’œuvre poétique et les écrits intimes sont accessibles aux lecteurs français. A l’occasion de cette réédition, André Velter avait réalisé une belle émission pour France-Culture . Qui sait, elle pourra peut-être s’écouter une nouvelle fois.
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« Frère par l’esprit et par l’inspiration de Villon et de Bartok, Attila Jozsef entendait faire "oeuvre de vie" jusqu’à son choix de trouver la mort. Mais comment assumer "à coeur pur" la "belle humanité" du siècle ? Comment trouver refuge au sein de la langue, seul lieu de repos possible pour le poète ? Enigmatique lucidité de la folie qui tente de partager l’impossible... André Velter s’entretient avec l’éditeur d’Aimez-moi, Jean-Pierre Sicre, et des lectures de poèmes nous sont offertes par Denis Lavant. »
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L’éditeur quant à lui présente son livre ainsi :
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« Attila Jozsef (1905-1937) tient rang, aux côtés de Lorca, de Trakl, de Rilke, d’Apollinaire, parmi les premiers poètes du XXe siècle. Ce qui ne l’empêche pas d’être mal connu des lecteurs de langue française, malgré une œuvre d’une séduction et d’une spontanéité inouïes, placée toute sous le signe d’une insurrection centrale coutre l’injustice et les désolantes laideurs du monde, soulevée de bout en bout par une force noire, sauvage. Le poète au prénom barbare, " né avec un couteau entre les mains ", ne sait pas se servir de ses armes, sinon contre lui-même. Aux autres il s’offre nu et lance ce seul cri : " Aimez-moi ! " parce qu’il sait qu’à cet appel jamais ne répondra que le silence. Et ce maladroit que la vie sans cesse fait trébucher décoche malgré cela contre le ciel des flèches d’une précision toute rimbaldienne - ou verlainienne... car la musique habite sa poésie comme aucune autre, ainsi que l’a tout de suite compris Bartok. Ce qui oblige ses traducteurs à être poètes eux-mêmes, ou à démissionner.
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On a voulu réunir ici pour la première fois en français l’essentiel du corpus " attilien " (plus de quatre cents poèmes), en reprenant quand c’était possible les versions qu’en ont proposées autrefois les meilleurs poètes (Jean Cavrol, Jean Cocteau, Georges-Emmanuel Clancier, René Depestre, Paul Eluard, Pierre Emmanuel, André Frénaud, Guillevic, Loys Masson, Jean Rousselot, Claude Roy, Pierre Seghers, Vercors...), ou bien en exhumant des traductions moins connues mais tout aussi admirables, enfin et surtout en donnant à traduire ce qui restait, à découvrir : soit les trois quarts de l’œuvre. Ayant affaire à un poète qui jamais ne voulut séparer sa création de son aventure intime, on a veillé par ailleurs à ce que la mise en lumière de sa poésie, assortie d’un commentaire détaillé, soit aussi la lecture de toute une vie.

Un monument indispensable à la bibliothèque de tout amateur de poésie. »
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Ce texte avait été publié en octobre 2005 sur le site Tout sur Budapest.
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Áron Gábor* : Le cri de la taïga

a vra.

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TRADUIT DU HONGROIS PAR MATHIAS KOLOS


« Un joli balcon donnait sur le Danube. Quand il ouvrait les fenêtres, une odeur d’acacia pénétrait dans la pièce. L’arbre se trouvait sur la promenade du fleuve, il était invalide. Une moitié avait été emportée par une bombe, l’autre était en fleur. Pour la deuxième fois dans l’année.

Il a regardé l’arbre et a du se réciter un aphorisme poétique quand sa femme, depuis son lit, l’a réprimandé, l’accusant de mal entamer la journée avec ses observations spirituelles. Ils se sont disputés. Il en a conclu qu’il était plus agréable d’être bucheron en Sibérie que de vivre avec une femme pareille.

L’acacia et le visage de sa femme lui sont revenus un million de fois, mais pas sa réponse. Il se rappelait le regard de sa femme, de l’étonnement et un peu de tristesse dans ses yeux, le son de sa voix et le mouvement de ses lèvres, mais les mots se sont envolés pour toujours par le balcon. Il avait des remords, pourquoi avait-il provoqué le destin ? S’il n’avait pas parlé de Sibérie, sa vie aurait été différente. Chaque détail de la journée est devenu décisif. Il a pleuré : pourquoi n’avait-il pas pressenti tout ce qui allait lui arriver ? »


Ce qu’il advint à l’auteur de ces lignes, en l’été 1945 : il est enlevé à Budapest alors qu’il se rend à une invitation de l’ambassadeur soviétique. Sa fonction de représentant de la Croix rouge hongroise ne le protège pas. Arrêté, condamné, déporté en Sibérie, il témoigne.

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Le cri de la taïga ce sont trois livres plutôt qu’un seul. C’est ainsi que Gábor le publia, à compte d’auteur. Le découpage du texte en rend compte : A l’Est de l’homme La descente aux enfers Des hommes millénaires.Pour rendre perceptible son cheminement, du monde libre aux camps sibériens, Gábor utilise un procédé narratif singulier. Un récit à la troisième personne, où deux personnages dialoguent : le civil et forçat. Les deux faces d’un homme qui doit apprendre à survivre. Le passage d’une éducation et d’une vie raffinée à l’inhumanité du monde concentrationnaire.
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Mathias Kolos, le traducteur de ce texte a connu Áron Gábor. Interrogé sur ce choix de l’auteur, il répond : « Son cheminement intérieur, je ne sais pas... C’est une façon d’expliquer le plus précisement possible ce qui se passe dans la tête d’un être humain qui n’est absolument pas préparé, et qui tombe dans un traquenard pareil. Il y a souvent des envolées philosophiques, des dialogues, entre le civil et le forçat. Le civil c’est vous et moi. Le forçat lui est pragmatique, il faut survivre. Et il y a un troisième personnage de temps en temps qui surgit, c’est le journaliste. Le journaliste est une sorte d’arbitre entre les deux. »
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Journaliste, c’était le métier d’Áron Gábor. Et c’est un livre qui lui valut sa condamnation : Túl a Sztalin-vonalon (Au-delà de la ligne Staline). Des textes rédigés quand il fut envoyé sur le front comme correspondant de guerre.Roman, témoignage... Profondément humain. Au milieu de ce désastre, la Sibérie, décrite comme une terre aimée.


Après quarante ans d’oubli, ces lignes nous reviennent, traduites en français. A lire absolument.


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* A ne pas confondre avec le révolutionnaire du même nom, qui était son arrière-grand père. Né en 1814 en Transylvanie, il participa à la Révolution de 1848.
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Ce texte avait été publié en janvier 2006 sur le site Tout sur Budapest


László József Biró, inventeur du stylo bille

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Pour les français, un stylo bille c’est un Bic. B comme bille, comme bic. Mais c’est surtout B comme Biró. Qu’on se le dise. Les Anglais le savent, eux qui écrivent avec un biro pen. Et d’Italie on vous a peut être un jour envoyé une lettre rédigée con un biro. Car nous devons cet extraordinaire petit stylo à László József Biró.

Né en Hongrie, il put fuir cette Europe fasciste où se préparaient toutes les monstruosités. Et c’est en Argentine que lui et son frère déposent leur brevet. Ils créent une société à Buenos Aires, où ils vendent les premiers stylos. La birome était née et présentée au monde... qui s’empressa de la copier.
Pour Pierre-Gilles de Gennes* il reste le "bricoleur génial de Budapest."




En France, ce n’est qu’en 1965 que le stylo bille fut autorisé dans les écoles. Une génération d’enfants, allait abandonner ses porte-plumes. Finis les encriers sournois qui se renversaient . Une véritable aubaine pour les plus maladroits. Les plus astucieux, eux, s’empressèrent de perfectionner l’invention des frères Biró. Ils démontèrent complétement leur stylo pour le transformer en sarabacane (fig.2).

Modestes, ils ne déposèrent aucun brevet. Ils n’en tirèrent d’autre profit que quelques heures de colle. Là, leurs instituteurs leur proposaient de saines distractions. Comme copier cent fois la même phrase... en utilisant l’objet du délit. Entièrement remonté (fig.1). La pointe bille retrouvait sa fonction première . Pour bombarder les salles de classe de minuscules boulettes de papier, comme pour remplir les pages de punitions gagnées à ce jeu, le stylo bille était devenu indispensable. Victoire totale.

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* Dans une conférence passionnante, où il analyse les tribulations des inventeurs. Le texte peut être consulté ici (en page 7 ).Pour les curieux : en hongrois stylo bille se dit golyóstoll.

Ce texte avait été publié en mai 2006 sur le site Tout sur Budapest .

Miel d’acacia de Hongrie, Akácméz

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.Ces lourdes fleurs sont celles de l’acacia (Robinia pseudoacacia). Odorantes et généreuses, elles offrent aux abeilles un nectar parfumé . Il en naitra le miel. Beau miel d’acacia venu de Hongrie. C’est de là que lui vient cette fragrance subtile. On lit son nom sur bien des rayonnages. Quelques faussaires le font entrer dans leur produit, dit de terroir, dit de France profonde. Prudence. Oui, il est exporté en quantités importantes. Mais ne le choisissez pas n’importe où.

Clair, couleur d’ambre pâle, il garde longtemps sa fluidité. C’est ce miel qui se moque si l’on ne tient pas bien droite sa tartine de pain. Il peut se goűter seul. Pour le plaisir, par pure gourmandise. Méz, akác, miel, acacia ... ces noms chantent dans nos deux langues.

Oui, ses vertus sont innombrables. On peut en faire une sorte d’acte de contrition, et le manger plus que le savourer en obéissant aux nouveaux dictats (vie saine, petits déjeuners bioétiquetés, etc...). Mais ce serait dommage. Il ne mérite pas ces mauvais traitements. Savourer, se délecter, ces mots lui conviennent d’avantage, le plus sauvage des ours le sait. .
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Ruches sous les acacias, dans une prairie encore sauvage

De vastes forêts d’Acacia font de la Hongrie l’un des premiers pays producteurs de ce miel parfumé . L’amélioration génétique de l’acacia, de son vrai nom robinier faux acacia, y a débuté dès 1930. Son but : obtenir une floraison abondante à des périodes différentes. Un site hongrois riche en informations. Et celui de Kovács József, de Fehér Sándor, Németh Ferenc. Il en existe tant d’autres ...
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Ce texte avait été publié en juillet 2004 sur le site Tout sur Budapest
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